Le présent rapport de SOS–Torture/Burundi couvre la période du 16 au 23 Janvier 2021 concernant les cas de violations des Droits de l’Homme au Burundi.
Au moins sept (7) personnes ont été assassinées au cours de la période dans différentes localités du pays.
Le rapport fait également état de cinq (5) cas d’arrestations et détentions arbitraires dont une femme détenue avec son bébé de moins de cinq mois dans la prison centrale de Mpimba.
I. ATTEINTES DU DROIT À LA VIE
– Dans l’après–midi de Samedi 16 Janvier 2021, sur la colline de Gishiha, en zone Maramvya, dans la commune de Burambi de la province de Rumonge (Sud-Ouest du Burundi), l’armée et la police ont, dans une opération conjointe, assassiné à coups de balles Déo Niyongabo, alias Côme, un sous–officier retraité des ex–FAB (Forces Armées Burundaises).
Selon des témoins, Déo Niyongabo a été abattu par la police chez lui à Masa et était recherché par la police depuis 4 ans comme un rebelle et sa tête aurait été mise à prix pour un montant de trois millions cinq cent mille francs burundais (3.500.000 FBU) à tout individu qui révèlerait sa cachette.
SOS–Torture/Burundi rappelle que la famille de Déo Niyongabo, alias Côme, était depuis plusieurs mois sous harcèlement sans précédent. À titre d’illustration, sa veuve, Immaculée Sakaganumwe et son fils de 16 ans, Alfred Dusengimana, sont détenus depuis près de 9 mois à la prison de Rumonge, sans procès.
– Dans la vallée de Ngonya située dans la commune de Minago en province de Rumonge (Sud-Ouest du Burundi), la police a tué par balles un ancien gendarme des ex–FAB en retraite connu sous le nom de Protais Niyondiko (un quinquagénaire).
Selon des témoins, Protais Niyondiko avait été arrêté Jeudi le 14 Janvier 2021 et a subi par la suite, ligoté, des séances horribles de torture pendant qu’il était accusé de faire partie d’un groupe rebelle opérant dans les communes de Burambi (province Rumonge), Mugamba (province Bururi) et Mugongo-Manga (Bujumbura).

SOS-Torture/Burundi considère que l’assassinat de Protais Niyondiko constitue une exécution extrajudiciaire et sommaire perpétrée par la même police qui l’avait pourtant arrêté.
– Dans la nuit de Lundi 18 Janvier 2021, des criminels non encore identifiés ont assassiné un homme connu sous le nom de Samuel Buringanire, sur la sous-colline de Rwankona de la colline de Kiremba rural, en commune et province de Bururi.
Selon des sources sur place, le corps défiguré et méconnaissable de la victime a été découvert le lendemain par des passants et n’a pu être identifié que par ses habits et chaussures.
– En fin d’après-midi de Lundi 18 Janvier 2021, un corps sans vie en décomposition d’une personne qui n’a pas été identifiée a été découvert par des passants dans la vallée de Nyamunyonga située sur la colline de Rushemeza, en zone, commune et province de Rutana (Sud-Est du Burundi).
Selon des témoins, le corps de la victime avait été déchiqueté par des chiens errants et a été enterré le même jour au même endroit sans enquête pour découvrir les auteurs de ce crime odieux.
SOS-Torture/Burundi condamne l’empressement avec lequel les autorités administratives et policières enterrent des corps sans vie découverts ici et là, au lieu de s’activer à mener des enquêtes approfondies pour découvrir les auteurs de ces crimes et les traduire en justice.
Dans l’après–midi de Mercredi 20 Janvier 2021, un corps sans vie d’un homme connu sous le nom de Domitien Ntahombaye (40 ans), a été découvert par des cultivateurs dans un caniveau d’évacuation des eaux usées sur la sous–colline de Rushara, colline de Kibati, zone de Masango, en commune de Bukinanyana de la province de Cibitoke (Nord-Ouest du Burundi).
Selon des témoins, le corps de la victime baignait dans une mare de sang, ce qui laisse penser qu’elle aurait été tuée pendant la nuit de la veille par des individus non encore identifiés. La même source révèle que Domitien Ntahombaye avait été aperçu la nuit de Mardi 19 Janvier 2021 dans un bistrot de la place en train de prendre un verre de bière. L’identité des auteurs ainsi que le mobile du crime ne sont pas encore élucidés.
– Au matin de Samedi le 23 Janvier 2021 vers 7h, des passagers dans un bus en provenance de la commune de Bukinanyana dans la province de Cibitoke (Nord–Ouest du Burundi) ont aperçu deux corps sans vie d’hommes tués sauvagement et attachés ensemble dans un boisement d’eucalyptus sur la sous–colline Bambo, de la colline et zone de Ngoma, en commune de Murwi, dans la même province de Cibitoke.
Des témoins indiquent que les visages des victimes non identifiées étaient défigurés et tous leurs corps étaient couverts de blessures dues aux coups de bâtons donnés par leurs bourreaux. Ils révèlent aussi qu’ils ont entendu des vrombissements d’un véhicule à 1h du matin, ce qui laisse penser que ces personnes ont été tuées ailleurs et que leurs corps ont été jetés à cet endroit.
SOS–Torture/Burundi a appris que les corps ont été enterrés vers 10h dans une fausse commune à cet endroit sur l’ordre de l’administrateur communal de Murwi sans que la police ait effectué des investigations nécessaires en vue de leur identification.
II. ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES
– Sur la colline de Gishiha, en zone Maramvya, dans la commune de Burambi de la province de Rumonge (Sud-Ouest du Burundi), la police a arrêté quatre hommes dont un sexagénaire, à savoir Égide Sindayigaya (frère de Côme), Thadée Niyonizigiye, Claver Ndayitezibiganza et Gérard Nkurikiye, et les a présentés à la population de la zone Maramvya et aux journalistes comme des complices de 2 « rebelles »exécutés sommairement par la même police les 16 et 18 Janvier 2021.
Selon des sources sur place, les habitants de cette localité crient à un pur montage et révèlent que les personnes interpellées ont été conduites vers une destination inconnue.
– Au matin de Mardi 20 Janvier 2021, la police judiciaire a arrêté Christa Kaneza à son domicile sis à Gasekebuye, en commune de Muha, dans la municipalité de Bujumbura. Elle a par après été détenue avec son bébé de moins de cinq mois au cours de la nuit du même jour avant d’être transférée le lendemain à la prison centrale de Mpimba.
Selon des sources sur place, l’ordre d’arrêter et d’incarcérer Christa Kaneza aurait été donné par le Commissaire Général de la Police Judiciaire, CP Bertin Gahungu, en l’accusant d’être commanditaire et collaboratrice des assassins de son époux, Thierry Kubwimana, mort dans la nuit du 25 Novembre 2020 trois heures après une attaque armée à son domicile à Gasekebuye.
Les mêmes sources révèlent que pendant des semaines, la police avait refusé d’enquêter sur des pistes intéressantes, pouvant mener aux véritables assassins et leurs complices, fournies par les proches de la famille.
Il sied de noter que le porte-parole de la police, OPP1 Pierre Nkurikiye, a également présenté Mardi le 20 Janvier 2020 Christa Kaneza menottée, ensemble avec trois hommes qui « ont avoué spontanément » avoir participé à l’assassinat de Thierry Kubwimana et accusé la veuve d’avoir participé au meurtre de son mari.
SOS-Torture/Burundi dénonce, en plus de l’arrestation et détention arbitraires des victimes dans ces deux cas, plusieurs abus commis régulièrement par la police nationale à travers son porte-parole, Pierre Nkurikiye, notamment la méconnaissance du principe de la présomption d’innocence, la présentation des suspects en violation de la règle absolue du secret de l’enquête préliminaire de dossiers en matière pénale et le fait que des membres des familles des proches des personnes recherchées ont été emprisonnés en violation du principe de la responsabilité pénale qui demeure individuelle.